La Grèce, encouragée par la dynamique européenne, vise la neutralité carbone pour 2050. Cela fait une dizaine d’années maintenant que le pays investit pleinement dans le développement des énergies renouvelables, avec notamment le soutien des subventions européennes. L’atteinte de cet objectif se manifeste par une multitude de programmes d’investissements et étapes intermédiaires, établis par le gouvernement grec, qui prévoit 80% du mix électrique produit par des énergies renouvelables d’ici 2030. Néanmoins, le pays fait face à divers enjeux sociétaux, économiques et matériels qui entravent la progression de sa transition énergétique.

Global Horizontal Irradiation : Valeur donnée. C’est l’énergie lumineuse réelle reçue du soleil à la surface de la terre , durant une journée (ou un mois) en tenant compte des phénomènes météorologiques. Cette valeur peut être mesurée ou estimée à partir de la fraction solaire.

Source : World bank group

Les contraintes géographiques et géopolitiques ont amené la Grèce à se tourner vers les énergies renouvelables. La forte sismicité du pays a conduit les autorités à ne pas considérer le développement de l’énergie nucléaire comme une option sur le territoire grec. En revanche, l’exploitation d’énergies renouvelables, éolienne grâce à sa grande surface côtière, et photovoltaïque du fait de sa forte irradiation solaire, a été privilégiée. Enfin, l’indépendance énergétique grecque représente un enjeu stratégique et sécuritaire pour la Grèce, en raison notamment de ses relations compliquées avec la Turquie, et de la faible capacité énergétique de ses voisins des Balkans.

 

LA GRECE VERS UNE TRANSITION VERTE, UNE PRIORITE GOUVERNEMENTALE

En 2023, l’énergie éolienne, photovoltaïque et hydraulique représentait 57% du mix énergétique grec, dépassant 25 TWh, un record pour la Grèce en matière de production d’énergie verte. Ce chiffre historique est le fruit de la volonté du gouvernement hellénique d’accélérer la transition verte du pays. Cette tendance répond à la fois au besoin d’assurer une sécurité énergétique nationale, tout en baissant le prix de l’électricité pour les usagers. A travers une série de mesures comme un accès facilité aux permis de construire des parcs photovoltaïques et éoliens, et une simplification des réglementations en vigueur, le gouvernement grec a ainsi favorisé le climat des investissements en faveur des énergies renouvelables.

Cette transition énergétique constitue un véritable changement de paradigme pour la Grèce, qui, il y a encore quelques années, dépendait largement du lignite pour la production électrique domestique. L’utilisation de cette ressource, présente localement mais très polluante, s’explique historiquement par une autorisation étatique d’exploitation sans pénalité malgré les externalités négatives générées. En effet, la société publique de production d’électricité PPC (Public Power Corporation, ΔΕΗ, Δημόσια Επιχείρηση Ηλεκτρισμού) a pu exploiter pendant plusieurs décennies cette ressource non renouvelable, grâce à la volonté du gouvernement de proposer des prix compétitifs de l’électricité à échelle nationale.

 Les politiques actuelles ont poussé la Grèce à progressivement baisser sa consommation de lignite : en effet, en 2014, ce dernier contribuait pour plus de 54% du mix énergétique domestique grec, contre 10,1% en 2022, et prévoit l’arrêt de ses centrales thermiques pour 2028. A l’heure actuelle, la production d’électricité verte provient principalement de l’énergie éolienne.

L’ESSOR DE L’EOLIEN ET DU PHOTOVOLTAÏQUE EN GRECE
DES PROJETS D’EOLIEN OFFSHORE EN GRECE SANS PRECEDENTS

L’éolien est particulièrement développé en Grèce : il représentait 21,5% du mix électrique en 2022, ce qui est au-dessus de la moyenne européenne qui était de 16% en 2022. Dans ce cadre, le gouvernement grec a récemment proposé un plan national pour le développement de l’éolien offshore, qui représente une source d’énergie sans précédent, dont la capacité serait estimée à 12,4 GW. Une proposition finale de ce plan est attendue très prochainement, et les premiers appels d’offres sont estimés à début 2025. Enfin, le parlement hellénique a adopté, fin 2023, une loi facilitant le raccordement au réseau public des parcs éoliens offshore.

A moyen terme, la Société hellénique de gestion des Hydrocarbures et des Ressources naturelles a identifié dix zones qui seraient propices au développement des premières installations flottantes, pour un volume total de 4,9 GW sur 978km². Une étude de Grant Thorthon estime les premiers investissements d’ici 2030 à hauteur de 6 Mds EUR et de 28 Mds EUR d’ici 2050. Parmi les zones retenues, on compte la Crète, la mer Egée méridionale, les îles du nord-est de la mer Egée, la mer Ionienne et l’axe Eubée-Chio. Néanmoins, les installations éoliennes offshore rencontrent quelques résistances à l’échelle locale en raison de l’industrie touristique grecque et des résidents locaux peu favorables à ce programme de développement. 

Image : New Project: IPTO Transmission Lines in the Country of Greece

Source :  New Project: IPTO Transmission Lines in the Country of Greece – Enveco – Environmental Protection, March 2023

Certaines zones ont également été exclues pour des raisons de sécurité nationale, notamment au niveau des zones maritimes proches de la Turquie. Enfin, il convient de souligner le caractère vieillissant des infrastructures de raccordement du réseau électrique grec entre les îles et le continent, qui, faute d’investissements en raison de la crise financière de 2008, répondront difficilement à l’ensemble des besoins des nouveaux parcs éoliens offshore.

 

LE PHOTOVOLTAÏQUE, DEUXIEME GEANT ENERGETIQUE GREC


Le photovoltaïque est également très développé en Grèce. En 2023, la Grèce s’est placée au deuxième rang mondial en termes d’intégration de l’énergie solaire dans son mix électrique, après l’Espagne, représentant ainsi 17,5% de ce dernier, avec près de 11GW, selon l’Agence internationale de l’énergie (IEA).
Au même titre que l’énergie éolienne, l’énergie solaire connaît un grand nombre d’investissements, avec pour objectif national d’élever la capacité photovoltaïque installée de 13,4 GW d’ici à 2030. En 2022, le groupe Helleniq Energy a investi 130 MEUR dans le projet de la plus grande centrale solaire de Méditerranée orientale et l’une des plus grandes d’Europe, à Kozani, au nord de la Grèce. Ce projet témoigne du développement rapide des énergies renouvelables en Grèce, et de la volonté du gouvernement d’équiper l’ensemble de son territoire pour accélérer sa transition écologique en toute cohésion nationale. La France est également présente sur ce secteur en Grèce, notamment avec les récents investissements de Reden Solar pour renforcer son activité sur le marché grec, ainsi que la société Voltalia ou encore Valorem.

Une expansion vers des autres énergies renouvelables

L’hydraulique face à des défis naturels

En termes d’énergie hydroélectrique, la Grèce se classe au 14ème rang européen par sa puissance installée dont la production s’est élevée à 4,06 TWh en 2019. Le secteur est en développement, avec notamment quatorze licences accordées fin 2021 à des projets de pompage-turbinage d’un total de 3 GW. Le plus important est celui d’Amfilochia (0,68 GW), dont la construction a commencé en novembre 2022 avec un financement partiel par le plan de relance européen de 2020, avec une mise en service prévue en 2025. Un projet de construction hybride, le premier de cette envergure en Europe, a également été annoncé par la société Terna Energy, dans la région d’Amari en Crète. Ce projet innovant exploitera l’énergie générée par le barrage de Potamoi, en la combinant avec l’énergie produite par deux parcs éoliens situés à proximité. Ce projet devrait garantir une puissance de 227 MW, couvrant ainsi une partie importante des besoins de l’île.

Toutefois, le pays est limité par sa géographie et son climat, qui contraint non seulement la construction de nouveaux barrages, mais également l’exploitation des stations hydrauliques existantes. Les sécheresses récurrentes que le pays connaît entravent la production de l’électricité issue de l’hydraulique : compliquent la rentabilité à long terme des installations hydroélectriques. Cette source d’énergie renouvelable est pourtant essentielle pour adapter la production d’électricité à la demande, permettant au réseau grec de gagner en flexibilité pendant les pics de consommation.

La géothermie, une solution pour l’avenir des villes grecques ?

. L’exploitation géothermique des sols grecs datent des années 1970, mais les recherches sur leurs potentiels ont été publiées en décembre 2023, après dix ans d’études et uniquement sur le nord du pays. Sur les trente-deux sites étudiés, vingt-cinq sont pourvus de gisements géothermiques allant de 30° à 99° pour l’île de Therma. C’est pourquoi le Ministère grec de l’Environnement et de l’Energie fait de cette énergie renouvelable une priorité nationale notamment pour améliorer l’efficience énergétique des bâtiments. Le potentiel géothermique du pays est estimé à 1 GW pour la production d’électricité, et 2,5 GW pour la production d’énergie thermique.

Il existe aujourd’hui quatre systèmes de chauffages individuels (gaz naturel, fuel, climatisations électriques et pompe à chaleur) qui ont progressivement remplacé les systèmes collectifs des immeubles. Les bâtiments sont refroidis grâce aux climatisations électriques ou à des pompes à chaleur de refroidissement, encore très coûteuses. Ainsi, la géothermie apparaît comme une solution idéale tant pour réduire les émissions de carbone liés aux bâtiments, que pour diminuer les coûts d’utilisation des climatisations. Conscient du potentiel géothermique de la Grèce, le parlement hellénique a voté, en 2021, la priorité du droit de gérer et d’exploiter le potentiel géothermique sur l’exploitation d’autres minéraux. Une simplification des démarches de location dans les zones à potentiel géothermique a également été décidée pour encourager leur installation.

Ces nouvelles dispositions permettent à des projets innovants de voir le jour intégrant la technologie de géothermie, pour des villes durables, comme Trikala ou Alexandroupolis avec son projet d’Iris Smart City. Sur les îles, le projet pilote d’une centrale géothermique de 8 MW à Lesbos témoigne du potentiel de la géothermie à rendre les territoires insulaires autonomes en consommation d’électricité. En effet, même avec un potentiel modéré des sols, la géothermie permet de chauffer et de refroidir les bâtiments publics, les logements sociaux et même les serres agricoles.

Des perspectives de développement à l’échelle européenne et nationale

Des projets d’interconnexion

Il convient de souligner les perspectives de développement des énergies renouvelables en Grèce, renforçant ainsi son intégration dans le marché européen de l’électricité, tout en s’affirmant comme exportateur de celle-ci à l’échelle communautaire. Le gouvernement grec actuel a récemment annoncé sa volonté d’accroître sa capacité d’interconnexion avec ses voisins, soit la Bulgarie, l’Italie, la Macédoine du Nord et l’Albanie. Elle vise également à développer l’interconnexion entre la Grèce continentale, la Crète qui n’y est pas reliée, et l’Egypte, Chypre et Israël avec le projet EuroAsia Interconnector. Des investissements importants sont également prévus à l’échelle nationale, pour améliorer l’interconnexion entre la Grèce continentale et ses îles, ainsi que la décarbonation de son territoire insulaire, comme avec l’initiative GReco Islands, dont la stratégie vise la neutralité climatique des îles grecques, en encourageant une meilleure cohésion territoriale. Dans ce cadre, le gouvernement a pour objectif de connecter les îles les plus peuplées au réseau électrique continental d’ici 2030.

REPowerEU en Grèce : quels investissements ?

Par ailleurs, le développement de l’énergie éolienne et photovoltaïque continue d’être largement encouragé, à la suite du déclenchement de la guerre russo-ukrainienne, qui a fait émerger le caractère stratégique de l’indépendance énergétique européenne. Dans ce cadre, le plan de financement européen REPowerEU bénéficie également à la Grèce, pour laquelle la multinationale grecque Mytilineos a prévu l’investissement de 2,5 Mds EUR, soutenu à hauteur de 400 MEUR par la Banque Européenne d’Investissement, pour le développement de projets photovoltaïques et de systèmes de stockage d’énergie par batterie (BESS) en Grèce et à l’échelle européenne d’ici 2027, augmentant ainsi la capacité énergétique d’environ 2,6 GW.

 

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